De Réel en Récit
La communication transpose le réel en récit.
L’art transforme le réel en ressenti.
Entre récit et ressenti, il est question d’épaisseur, de fulgurance et de poésie.
Le récit, s’appuyant sur des faits, un contexte, des informations précises, va constituer un déroulé du réel. Un procès-verbal de police est en soi l’acte premier du réel posé en récit. Nos journalistes ne sont pas loin de la police. En tout cas ils ne peuvent échapper à cette formule bien cadrée du réel en récit. S’ils s’en échappaient ils deviendraient écrivain, ce qu’a fait un petit nombre d’entre eux déjà, décrivant un réel fictif en récit…
Le récit par nature récite, il cite à nouveau. Par nature il ne dégage rien de nouveau à re citer le réel.
L’art se permet de jouer avec le réel. L’artiste n’est pas policier, aucun procès-verbal ne lui est demandé. Au contraire, on lui demande plutôt de nous extirper du réel pour nous transporter ailleurs.
Pour sortir du récit, il y a la voie de la poésie.
Par ses fulgurances, elle nous emporte ailleurs, nous permet d’accéder à d’autre forme de ressenti. Le ressenti poétique nous fait sentir à nouveau, il ne cite rien. Citer c’est prendre de l’extérieur une information et nous la mettre à nouveau sous les yeux, elle reste inconditionnellement extérieure à nous.
Sentir c’est user de nos sens pour toucher à l’intérieur de nous ce qui provoque un ressenti.
Le réel peut être ressenti par le biais de l’émotion, c’est là le médium de l’artiste, provoquer une émotion, la faire émerger de l’intérieur de nous-mêmes.
Lorsque le ressenti émerge, le réel a un goût d’éternel. La poésie est l’un des chemins du réel vers l’éternel. L’art tout autant.